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Le Sbire de Manille (8)

By   /   7 avril 2011  /   No Comments

- « Et sinon, comment ça se passe vos leçons de piano ?
- Pfff ! m’en parle pas, c’est trop la te-hon le piano ! Moi je voulais jouer du synthé, ça au moins c’est cool, mais mon père veut pas m’acheter un Bontempi. Il se rend pas compte que le piano pas électrique c’est complètement out, c’est trop un ringard. »
 »Le Sbire manifestait un intérêt sincère pour les passions de la jeune femme. » Même si Le Sbire était assez d’accord sur le fond avec cette dernière affirmation, il se sentit obliger de défendre les saines valeurs de la patriarchie. - « Allons, je suis sûr que votre père ne cherche qu’à faire ce qu’il y a de mieux pour vous
- Tu parles ! Il essaie tout le temps de me caser avec ses hommes de main, c’est insupportable, c’est tous des brutes plus bête les unes que les autres et en plus ils puent. »

- « Et sinon, comment ça se passe vos leçons de piano ?
- Pfff ! m’en parle pas, c’est trop la te-hon le piano ! Moi je voulais jouer du synthé, ça au moins c’est cool, mais mon père veut pas m’acheter un Bontempi. Il se rend pas compte que le piano pas électrique c’est complètement out, c’est trop un ringard. »
 »Le Sbire manifestait un intérêt sincère pour les passions de la jeune femme. » Même si Le Sbire était assez d’accord sur le fond avec cette dernière affirmation, il se sentit obliger de défendre les saines valeurs de la patriarchie. - « Allons, je suis sûr que votre père ne cherche qu’à faire ce qu’il y a de mieux pour vous
- Tu parles ! Il essaie tout le temps de me caser avec ses hommes de main, c’est insupportable, c’est tous des brutes plus bête les unes que les autres et en plus ils puent. »

Le Sbire dut reconnaître intérieurement que ses collègues auraient quelques leçons à recevoir sur le plan de l’hygiène personnelle. Il avait lui-même proposé à plusieurs reprises de leur prêter son onguent à la lavande pour les cheveux, mais tous avaient diligemment refusé. Sur ces entrefaites, le serveur arriva avec les plats et la conversation s’interrompit. Pendant que Christine mangeait ses légumes, Le Sbire se débattait avec un homard en gelée aux artichauts (« le plat le plus cher de la carte ») avec un sentiment croissant de désespoir. Le serveur avait négligé d’inclure un kit de chirurgie complet pour dépiauter la bête et un masque de soudeur pour se protéger des éclats de chair et de carapace volant en tous sens. Lorsqu’il eut enfin fini, son assiette n’était plus qu’un spectacle de désolation semblable à Saint-Etienne un jour de pluie et Le Sbire était obligé de se tenir très exactement dans une posture de trois quart profil pour dissimuler à Christine du mieux possible toutes les taches de sauces maculant sa veste. Au moins cela mettait-il en valeur sa mullet.
 »Il faut dire que Le Sbire avait dégainé sa mullet des grandes occasions » C’est dans cette posture inconfortable, distrait de surcroit par un morceau de carapace coincé entre deux molaires que Le Sbire se laissa surprendre. Venu de nulle part, un vicieux coup sur l’occiput lui plongea violemment le nez dans son assiette. Par chance, son mystérieux agresseur avait compté sans la mullet du Sbire qui avait amorti le choc et lui avait évité de justesse de tomber raide évanoui. Avec l’agilité du puma des Andes, Le Sbire se releva dans une foudroyante volte-face, lançant dans le même mouvement un ample revers de son bras gauche, projetant des morceaux d’artichaut dans toutes les directions. Aveuglé par la sauce, il manqua sa cible. Tournant la tête frénétiquement à droite puis à gauche comme une mangouste épileptique pour déstabiliser son mystérieux adversaire, Le Sbire s’essuya prestement le visage et put enfin contempler la figure de son ennemi. Il resta un instant paralysé par la surprise : c’était un visage impossible, venu d’au-delà de la mort ! Frank ! Frank qui était censé être mort depuis des semaines ! Ce maudit Frank qui avait tué son ami Rodriguez et qui maintenant prenait en otage sa dulcinée ! Le sang du Sbire ne fit qu’un tour tandis que son entrainement ninja reprenait le dessus. Il lança l’une de ses attaques préférées : un moulinage de bras d’une envergure dantesque suivi d’un puissant coup de pied fouetté montant presque jusqu’à la hanche de son adversaire. Avec une lâcheté sans nom, Frank utilisa le corps frêle de Christine pour parer le coup. « Aïeuh » cria la jeune femme éperdue de douleur. Alors que Le Sbire tentait de s’excuser, Frank profita de la distraction avec une fourberie digne des pires chacals. Poussant Christine sur le côté, il lança un direct du droit que Le Sbire para maladroitement avec son nez suivi d’un vicieux coup de pied dans le genou. Le Sbire tomba à terre, se tordant de douleur comme un joueur de football italien dans une surface de réparation. Frank lui mit encore un bon coup de talon au visage pour la forme avant de s’enfuir avec Christine.
 »Le Sbire s’était bien battu, mais avait tout de même pris une raclée sans réussir à toucher son adversaire. » « Reviens te battre espèce de lâche » lui cria Le Sbire une fois certain que l’autre était bien parti. Se relevant avec la prestance d’une autruche unijambiste, Le Sbire réussit à se trainer jusqu’à la fenêtre juste à temps pour voir Frank pousser Christine dans sa voiture et s’enfuir. Le genou en compote et saignant abondamment du nez, le Sbire n’était plus animé que par la haine et la vengeance. Claudiquant aussi vite que possible jusqu’à son propre véhicule, Le Sbire était bien décidé à lancer la chasse. Pestant contre le sagouin qui avait garé sa voiture n’importe comment en plein milieu du parking, Le Sbire mit un moment à faire demi-tour et n’y parvint finalement qu’au prix de quelques phares et pare-chocs amochés. Le temps qu’il finisse de manœuvrer, la voiture de Frank avait complètement disparu dans le trafic intense de Manille. La Sbire réalisa bientôt qu’il n’y avait plus rien à faire maintenant que de rentrer à la maison de Marlowe, regrouper ses forces, organiser les recherches. Et trouver un mouchoir pour son nez avant que sa chemise ne soit complètement irrécupérable.

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