Quelques heures après le coup de fil fatidique, Le Sbire était pourtant en confiance. Il sentait qu’il était proche du but, il arrivait maintenant à tenir à peu près en place perché sur ses patins à roulette sans voir ses pieds partir de leur propre initiative dans des directions opposées. Le Sbire craignait un peu le moment où il allait devoir réellement se déplacer avec ces engins infernaux aux pieds, mais pour l’instant son attention était divisée entre ses efforts pour rester à la verticale et l’enchainement de froncements de sourcils et de regards menaçants qu’il adressait sans relâche à ses collègues pour tenter de conserver ce qui restait de son statut de mâle dominant au sein du groupe.
»Le regard du Sbire aurait suffi à intimider un hippopotame. »
La deuxième faille dans le plan du Boss était apparue peu de temps après : attaquer en plein jour n’était pas la meilleure idée du monde. Même dans leur tenue « camouflage urbain » (uniforme et cagoule rouges, bandana jaune et paillettes sur les bras), les ninjas avaient été repérés par Tony avant d’avoir eu le temps d’agir et avaient dû se lancer dans une poursuite effrénée.
»Le tenue de camouflage urbain du clan du cobra était parfaitement adaptée pour se fondre dans les concerts de hip-hop breakdance des MJC de la banlieue de Hong-Kong. » La suite des événements se confondait dans l’esprit du Sbire. Il se rappelait s’être ramassé plusieurs fois, sur la chaussée, sur le trottoir, dans le caniveau, dans des poubelles, sur une vieille… Il se rappelait aussi comment le groupe à un moment avait tenté de coincer Tony en coupant à travers un jardin public. L’un des camarades du Sbire lui avait signe d’exécuter avec lui une figure destinée à lui donner de la vitesse pour sauter d’une rampe, par-dessus la clôture, sur la route. La camarade avait fini dans le fleuve et Le Sbire, une fois de plus, par terre. La poursuite avait culminé lorsque Tony s’était engagé sur l’autoroute pour semer enfin les ninjas. Seul Le Sbire était parvenu par miracle à s’agripper à l’arrière de sa voiture. C’était à ce moment-là qu’il avait perdu sa cagoule, emportée par le vent. Durant plusieurs minutes parmi les plus terrifiantes de sa vie, il s’était accroché à la voiture avec l’énergie du désespoir tandis que Tony fonçait le long de la bretelle puis à travers l’échangeur. Les autres véhicules semblaient avoir engagé un concours à celui qui frôlerait Le Sbire du plus près et c’est à la suite d’une nouvelle collision évitée de justesse que Tony avait fait une embardée, allant s’emplafonner contre la bordure en béton tandis que Le Sbire allait s’écraser contre un téléphone d’urgence. Groggy, il avait repris ses esprits juste à temps pour voir Tony, boitant et lui aussi sonné par l’accident, s’enfuir vers l’une des portes de secours permettant aux piétons d’évacuer l’échangeur en cas d’accident. Claudiquant et voyant double, Le Sbire avait pourtant trouvé assez de ressources pour continuer la poursuite. Sa ténacité fut récompensée lorsque, arrivant à son tour à la porte, il vit que Tony était coincé juste devant lui ! Une grille lui barrait la route, que le jeune policier était bien hors d’état d’escalader. Malheureusement pour Le Sbire, il était encore séparé de sa proie par un obstacle incommensurable, inévitable, infranchissable. Un escalier !
»Les marches de la haine. » Une saloperie de putain de chierie d’escalier ! Qui descendait en plus, l’empaffé ! Encore en montée, Le Sbire aurait pu négocier mais là, c’était comme si le monde entier, ou en tous cas la totalité de la direction des travaux publics de Hong-Kong, s’était ligué pour lui pourrir la vie. Le Sbire était en avait marre. Le Sbire avait mal, Le Sbire était à bout, Le Sbire était en colère. Le Sbire mit un pied sur la première marche…
Le Sbire (6)
Quelques heures après le coup de fil fatidique, Le Sbire était pourtant en confiance. Il sentait qu’il était proche du but, il arrivait maintenant à tenir à peu près en place perché sur ses patins à roulette sans voir ses pieds partir de leur propre initiative dans des directions opposées. Le Sbire craignait un peu le moment où il allait devoir réellement se déplacer avec ces engins infernaux aux pieds, mais pour l’instant son attention était divisée entre ses efforts pour rester à la verticale et l’enchainement de froncements de sourcils et de regards menaçants qu’il adressait sans relâche à ses collègues pour tenter de conserver ce qui restait de son statut de mâle dominant au sein du groupe.
»Le regard du Sbire aurait suffi à intimider un hippopotame. »
- Published: 14 années ago on 15 octobre 2010
- By: Barracuda
- Last Modified: avril 19, 2012 @ 9:06
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