Une fois n’est pas coutume, nous nous écartons des nanars purs et durs pour aborder une solide série B des années 80 qui, après avoir connu un échec au box office, a fini par regagner ses lettres de noblesse auprès des amateurs du genre. « The Punisher » de Mark Goldblatt, avec Dolph Lundgren dans le rôle titre.
Jérémie Damoiseau a publié en fin d’année dernière une véritable somme sur ce film. « Punisher l’histoire secrète », fruit de près de 10 ans de travail qui l’a amené à rencontrer plus de 25 personnes ayant participé au projet et à collecter des montagnes de documents de production. Le tout sous une couverture reprenant la formidable affiche française d’époque de l’illustrateur Laurent Melki.
L’ouvrage, préfacé par Hélène Merrick de Starfix, est une passionnante plongée dans ce cinéma de série B (que, derrière notre cynisme de façade, nous aimons tellement en ces lieux), revenant avec une minutie et une patience de bénédictin sur tous les aspects du tournage. De la pré-production en pleine vague des adaptations de comics dans le sillage de Batman au tournage délocalisé en Australie. De la promotion française étonnante (entre un sketch avec les Nuls et un concours pour gagner une Harley animé par Patrick Sabatier) à l’échec commercial condamnant le film aux vidéo-clubs et enterrant au passage le projet d’une suite pourtant claironnée dès le générique de fin…
Un livre que nous ne pouvons que recommander. Il faut avouer que Jérémie Damoiseau connaît son affaire, lui qui a travaillé au début des années 2000 dans le milieu de la distribution cinématographique et est devenu, depuis 2008, l’ami et le collaborateur de Dolph Lundgren dont il a animé le site officiel. Il a aussi rédigé un mémoire universitaire sur la carrière du géant suédois.
Il nous a accordé un entretien qui permet de revenir sur le livre et sur le film…
Ce film a été très important pour votre amour du cinéma de genre, pouvez-vous nous raconter sa découverte ?
J’ai d’abord fait la découverte du cinéma et de Dolph Lundgren avec Les Maîtres de l’univers qui a été mon Star Wars à moi. Et dans les magazines qu’on trouvait à l’époque comme Starfix, Ciné-News et Impact, Le Scorpion rouge puis Punisher ont été abondamment traités (comme le seraient aujourd’hui des films plus importants). Donc pendant un an avant la sortie, j’ai été abreuvé de tous les articles, entretiens et photos parus sur Punisher, si bien qu’il était impératif que je le vois quand il est enfin sorti en salles, et ce malgré son interdiction aux moins de 13 ans alors que je n’en avais pas 11…
Comment êtes vous entré en relation avec Dolph Lundgren ?
Je tenais le seul site* vraiment consacré à Dolph, qui m’avait été légué et que j’ai enrichi, avant d’avoir l’opportunité de faire une interview avec le géant Suédois pour la promotion de Missionary Man, son troisième film derrière la caméra. Dolph connaissait mon site et m’en a d’emblée remercié tout en me demandant mes coordonnées pour discuter de ce qu’on pourrait faire ensemble (la reconnaissance idéale en somme). Il m’a recontacté très vite comme promis, et à peine quelques semaines plus tard je lui rendais visite à Sofia, en Bulgarie, sur le tournage d’une production Nu Image, Direct Contact, dans l’idée d’en faire un site complet un peu à la manière de ce qu’avait fait Peter Jackson sur Le Seigneur des Anneaux (avec des interviews, un journal de bord et des vignettes vidéo du tournage). Les producteurs étaient a priori OK mais au final ils n’ont jamais validé le projet. En revanche sur le film suivant, Command Performance (Commando d’élite en France), Dolph avait plus de poids puisqu’il en était le réalisateur et a donc pu me faire rentrer dans le budget. J’en ai fait un site assez complet et Dolph a même réalisé un teaser sur une idée à moi (vaguement inspirée de teasers « concepts » sans images du film comme ceux de Rocky IV et Terminator 2) qui a fait plus de buzz que d’ordinaire sur un DTV du Suédois. Puis on a commencé à travailler ensemble sur sa com’ et des projets annexes…
* Ironiquement je n’ai plus eu beaucoup de temps à m’y consacrer ces dernières années, donc il est plutôt conseillé de se rendre sur le forum, mis à jour quotidiennement.
Vous êtes devenu l’un des ses collaborateurs réguliers. Quelles relations avez vous avec lui ?
A la fois amicales et professionnelles. Professionnellement il est bien organisé, rigoureux et rationnel. C’est quelqu’un qui cogite beaucoup. Au fil des années et des expériences sur des tournages et autres, j’ai pu passer pas mal de temps avec lui et sans artifices. Je fais d’ailleurs un peu abstraction de sa carrière pour ne pas le gêner et le bombarder de questions sur sa carrière passée, sauf dans le cadre d’une interview spécifique. Dolph est quelqu’un de très humble, qui a les pieds sur terre et aime s’entourer d’amis et collaborateurs qui ne sont pas sous l’emprise du showbiz. Ses amis proches sont plutôt soit des anciens camarades du karaté Kyokushin ou des gens qui n’ont rien à voir avec le cinéma. Quand vous dînez avec lui au restaurant, vous sentez qu’il aime partager les choses simples de la vie sans arrière-pensée ni attitude ostentatoire pour en mettre plein la vue.
Dolph Lundgren est toujours très actif, même si la plupart de ces films sont surtout destinés au marché de la vidéo ou de la VOD. Comment mène-il sa carrière aujourd’hui ?
C’est une bonne question, dans une période où les contextes personnels et économiques (du marché) ont beaucoup joué dans ce qu’il a fait ces dernières années. A ce titre, Expendables a été une aubaine qui a redoré son blason, et en même temps joué en sa défaveur… D’un côté Dolph Lundgren est revenu dans le collimateur des médias et acquis sa place au panthéon des stars cultes du cinéma d’action au même titre que ses pairs à la notoriété et à la popularité bien mieux établies.* Et en même temps cela a attiré aussi les producteurs opportunistes et peu exigeants, au moment même où le marché du DVD et particulièrement du DTV d’action s’écroule (et où même faire un film à $5 millions devient difficile). A cela s’est ajouté au même moment le divorce de Dolph qui l’a contraint à accepter des offres ne l’enchantant guère, à commencer par King Rising 2… En même temps depuis le premier Expendables, Lundgren veut travailler son jeu avec des rôles qui ne le cantonnent pas au stoïcisme du héros d’action habituel et s’amuse donc plus ou moins avec des seconds rôles hauts en couleurs (même si les films ne le sont pas forcément), souvent des méchants à l’humour noir un peu comme Andrew Scott d’Universal Soldier mais il aime aussi s’essayer à la comédie comme le très bon Small Appartments de Jonas Akerlund. Et dans le même temps, Dolph continue sur sa lancée de réalisateur/scénariste/producteur en continuant de développer ses projets personnels, qui mettent du temps à se faire financer et être mis sur pied dans de bonnes conditions. Comme Skin Trade pour lequel il ne voulait pas compromettre le budget et le temps de tournage, et un autre projet qui lui est cher et qu’il parviendra à lancer et réaliser j’espère prochainement : Nordic Light, un thriller situé en Suède pendant la Première Guerre mondiale,.
* Il est d’ailleurs intéressant de voir que certains de ses films ont bénéficié d’éditions Blu-ray très fournies et plus prestigieuses que les Stallone, Van Damme etc. comme Le Scorpion rouge (aux Etats-Unis et au Royaume Uni), Punisher (en Allemagne puis en France et en Australie), Dark Angel et Au-dessus de la loi (aux States et en Allemagne), L’Homme de guerre (en Allemagne) ou même le plus méconnu Assassin Warrior alias Silent Trigger (en Allemagne)…
Comment vous êtes-vous lancé dans le projet d’un livre autour du film Punisher ?
Je fais des recherches depuis très longtemps mais je travaille en particulier depuis des années sur un projet autour de la genèse et des coulisses de toute la filmographie de Dolph, ce qui m’a amené à interviewer plus de 150 personnes liées à ses films (ainsi que ses projets avortés), réalisateurs, producteurs, scénaristes, compositeurs, acteurs et bien d’autres. J’ai donc énormément de matière en plus des nombreuses archives et magazines d’époque que j’ai accumulés. Mon texte sur Punisher a d’abord été écrit en vue d’un long livret pour l’édition Blu-ray dont il n’a finalement pas fait partie, Réalisant que j’avais déjà quasiment un livre, je l’ai donc peaufiné dans ce sens. Au final, ce n’est donc pas un projet que j’ai initié moi-même puisque Punisher ne représentait à la base qu’un chapitre dans mon propre projet et que je n’avais pas même pas réalisé qu’il y avait matière à en écrire un livre entier (alors que comparé à d’autres productions plus chaotiques comme Les Maîtres de l’univers, Le Scorpion rouge ou même L’Homme de Guerre, le tournage de Punisher s’est déroulé très simplement).
Vous avez amassé un très grand nombre d’informations et de documents rares sur ce film et rencontré beaucoup de ses protagonistes, comment avez vous procédé ? Quelles sont les rencontres ou les trouvailles dont vous êtes le plus fier ?
Comme je l’ai dit plus haut, cela fait des années que je fais des recherches continues et que j’achète tout magazine qui me peut donner un peu plus d’informations. Dès que j’ai eu accès à internet fin des années 90/début 2000 j’ai commencé à creuser un peu plus et à contacter des personnes à interviewer. Sur Punisher, mon premier contact a été le compositeur Dennis Dreith (dont j’ai toujours adoré la musique et espéré une B.O., inédite jusqu’en 2005) avec qui j’ai vite sympathisé et même collaboré sur un court-métrage que j’ai réalisé. Puis j’ai pris contact et interviewé Mark Goldblatt pour la première fois quelques années plus tard.
Je n’ai pas de méthode particulière, les choses se font au fur et à mesure, parfois au fil des trouvailles et des hasards. Aujourd’hui, c’est plus facile de retrouver les gens avec tous les réseaux sociaux, alors qu’il y a 10 ou 15 ans beaucoup de réalisateurs, directeurs photo et autres techniciens n’avaient même pas de site personnel. Et malgré cela, il faut parfois ruser pour retrouver la trace de certains techniciens, en passant soit par les guildes et les syndicats, soit par des intermédiaires.
Sinon, à Los Angeles où les boutiques de cinéma vendent souvent des copies de scripts, j’ai pu aussi me procurer deux versions du scénario, et puis bien sûr il y a eBay où j’ai acheté beaucoup de photos (certaines rares et chères qui sont dans le livre), d’affiches étrangères rares (du Japon comme de Thaïlande ou même d’Egypte), ainsi que les notes de production originales. Et puis j’ai eu aussi la chance de travailler chez un distributeur où j’ai pu dénicher des infos et « sauver de la mort » quelques perles rares, dont la première plaquette teaser de Punisher destinée au marché de Cannes, avant que Dolph ne soit choisi…
Je n’ai malheureusement pas encore réussi à interviewer Louis Gossett Jr, ni surtout la légendaire décoratrice et costumière Norma Moriceau (les Mad Max) tristement décédée à la fin de l’été 2016. Par contre j’ai pu retrouver par exemple (et après beaucoup de tentatives) le monteur Tim Wellburn (en charge de la poursuite finale de Mad Max 2) aujourd’hui retraité et qui comme d’autres m’a donné dans son interview comme une leçon de cinéma. J’étais très content de trouver le directeur photo Ian Baker ou le directeur des cascades Chris Anderson, et j’ai même pu échanger avec l’un des deux gardes du corps Yakuza qui est devenu champion du monde de Kyokushin, ainsi qu’avec l’une des comédiennes qui jouait la fille cadette de Frank Castle et que j’ai revue par hasard à Los Angeles par un ami commun… Toutes les personnes interviewées (25 au total, par téléphone, Skype et email) sur ce projet ont été des plus plaisantes, mais j’avoue que mon entretien avec Kim Miyori (l’interprète de la terrible Lady Tanaka) est probablement l’un des mes favoris, ainsi que ma discussion avec l’attaché de presse français du film, Robert Schlockoff (frère d’Alain de L’Ecran Fantastique), qui m’a raconté sans retenue et avec une candeur inattendue son expérience avec Dolph, le distributeur Capital Cinéma, et tous ses souvenirs et anecdotes sur la sortie du film en France…
Le personnage du Punisher est d’abord un personnage Marvel. Comment le film a t-il abordé ce caractère comic book ?
Il est d’abord important de rappeler que la première version du scénario n’a été écrite qu’en 1987, alors que la première publication solo du personnage (la mini-série Punisher : Cercle de Sang) venait de sortir (même le comic mensuel écrit par Mike Baron ne sort qu’un peu plus tard cette année-là) et qu’avant cela, il n’y avait que des apparitions du Punisher dans d’autres titres comme Spider-Man ou Daredevil entre autres. Le scénariste Boaz Yakin, dont c’est le premier script officiellement produit et qui deviendra par ailleurs un auteur-réalisateur reconnu, était un fan du personnage et avoue s’être largement inspiré de l’approche de Frank Miller dans Daredevil, dont la secte de « La Main » se retrouve chez les Yakuzas de Punisher par exemple… Il y a pas mal de justifications à ses choix que je détaille dans le livre mais il a sincèrement tenté de rendre justice au personnage. Goldblatt et le producteur Robert Mark Kamen (scénariste des Karate Kid, Le 5ème Elément, Taken), qui a réécrit le script de production, ont également essayé de rendre la névrose du personnage un peu plus « palpable » par la suite.
Le look très jean et cuir et surtout l’absence de la célèbre tête de mort sur le T-shirt du héros a été beaucoup reproché par les fans…
Le look de cuir noir à la Mad Max me paraît plutôt une bonne approche. En fait Batman était en production quasiment au même moment, mais Mark Goldblatt semble reconnaître que s’il avait pu voir le film de Tim Burton avant, ils auraient pu tenter une sorte de costume-armure similaire pour le Punisher et qui aurait ressemblé un peu plus à la BD mais sans l’aspect collant en lycra qu’ils voulaient éviter à tout prix. En ce qui concerne la tête de mort, le réalisateur reconnaît l’erreur de ne pas l’avoir incluse sur le costume (et moins discrètement que sur ses dagues) mais ils (et surtout le producteur Robert Mark Kamen) pensaient fortement à l’époque que ça n’avait pas de sens pour le personnage. Le Punisher le portait pendant tout le scénario, puis uniquement pendant le dernier tiers dans une version suivante. Yakin s’est battu pour qu’ils conservent le logo. Au final, c’est même son acharnement à être le plus fidèle possible au personnage et la BD qui l’a fait évincer du projet, qui a donc été revu par Kamen lui-même puisqu’il est scénariste avant tout. Certains cadres de Marvel (qui appartenait alors en fait à la société de production New World) avaient également plaidé la cause du crâne lors d’une réunion pendant laquelle Tom DeFalco avait trouvé une solution narrative (que je raconte dans le livre) pour justifier la présence de la tête de mort. Mais malgré le consensus qui s’en est suivi, Kamen en a encore une fois décidé autrement. L’absence du logo ne doit pas en elle-même être une excuse pour rabaisser le film, et il est intéressant de voir que personne n’a rien dit sur les costumes du premier X-Men.
Mark Goldblatt, son réalisateur, semble avoir été très influencé par le cinéma de genre notamment asiatique et italien…
Mark est un cinéphile et cinéphage aux goûts très éclectiques. C’est un fan absolu de Fritz Lang et il doit voir vraiment de tout, mais il penche particulièrement vers les films de genre et d’exploitation, notamment les Mario Bava puis les Dario Argento, et cela se ressent énormément dans Punisher (et participe de sa mauvaise réception en 89) qui à mon avis ressemble en fait plus à un film d’exploitation hybride des années 70 qu’aux films d’action des années 80 auxquels il est rattaché. La fibre asiatique est plus subtile à définir en ce qui concerne Punisher car les films de HK de Tsui Hark et de John Woo commençaient à peine à se diffuser sous le manteau aux Etats-Unis, mais on sent des influences inconscientes tout comme un rapport avec le cinéma d’exploitation japonais. Le scénariste original Boaz Yakin s’est par contre beaucoup inspiré de Frank Miller et de Baby Cart (le manga comme la version U.S. Shogun Assassin) quant il a écrit le script initial.
D’autres acteurs avaient été intéressés par le rôle, Arnold Schwarzenegger, Kurt Russell mais aussi Steven Seagal et surtout Christophe Lambert qui avait été le premier choix de la production. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Je ne sais pas si Arnold et Kurt était intéressés eux-mêmes, mais leurs noms ont été mentionnés par la production (selon des propos de Mark Goldblatt à l’époque dans la revue Comics Scene, mais il ne s’en souvient plus). Comme c’est souvent le cas, le studio (New World) avait dressé une liste d’acteurs potentiels vers qui aller. C’est le producteur Robert Kamen qui voulait en premier choix Christophe Lambert (on est en 1988, soit seulement deux ans après Highlander) et est allé lui rendre visite à Paris pour le faire signer. Goldblatt l’a rencontré également, mais d’une part Lambert avait une jambe immobilisée par un accident et d’autre part New World ne voulait pas lui payer le cachet demandé selon Kamen. Quant à Steven Seagal, c’est lui qui voulait le rôle alors qu’il venait de faire Nico qui n’était pas encore sorti au moment du casting ; il était donc encore inconnu ce qui l’a éliminé d’office… Par ailleurs, le casting improbable qui m’a également frappé, c’est celui de Nicole Kidman qui a bien failli jouer le rôle de la partenaire de Louis Gossett Jr !
Le choix d’un Dolph Lundgren qui sortait des Maîtres de l’Univers peut sembler étonnant pour incarner ce grand brun ténébreux très américain. Comment est-il arrivé sur ce projet ?
Dolph a toujours été plus intéressé par les rôles sombres et ambigus que par les héros plus lisses (ce qui explique en partie son désintérêt partiel pour Musclor). Son nom était parmi les premiers sur la liste des producteurs, il était à l’époque considéré comme bankable et étoile montante auprès des distributeurs étrangers. Après avoir un peu hésité (il avait peur de l’image d’un titre comme « The Punisher ») Dolph a accepté, justement pour jouer à la fois un Américain « normal » dans le prologue (coupé dans la version finale) puis un personnage sombre et exacerbé qu’il abordé quasiment comme un rôle de composition tout en se plongeant dans la BD.
Avec le recul, quelle place le rôle du Punisher occupe t-il dans la carrière de Dolph Lundgren ?
C’est l’un de ses rôles les plus populaires, le film a toujours eu sa base de fans mais ne cesse de remonter dans l’estime des gens, notamment depuis le premier remake/reboot avec Thomas Jane et John Travolta. Et puis on l’a vu l’année dernière lors de la sortie Blu-ray, où le film s’est vu réhabilité avec des critiques (d’Olivier Père d’Arte et d’Alexandre Poncet dans Mad Movies notamment) qu’on n’aurait jamais espéré lire à l’époque ni après.
Comment l’acteur considère t-il ce rôle et le film de façon plus générale ?
A l’époque, Dolph était très enthousiaste et excité par le rôle qui représentait pour lui une étape et un véritable challenge après seulement trois rôles un peu tout d’un trait. Mais entre le montage final, la déception au box-office et la sortie annulée aux Etats-Unis, sa vision en est devenue beaucoup plus mitigée. Il faut savoir que Dolph a toujours été assez dur avec lui-même et ses films une fois terminés, il n’est pas du genre à revoir ses films ou à se vanter de sa filmographie. Aujourd’hui, comme avec d’autres de ses rôles les plus connus, il reconnaît la popularité du film et ses qualités, et se rappelle surtout le plaisir qu’il a eu à le tourner à Sydney où il avait étudié, et à combattre les deux champions japonais de karaté Kyokushin.
Le film a été une déception au box office à sa sortie. Pourquoi à votre avis ?
D’abord par ce qu’on ne lui en n’a pas donné les moyens, de part un studio et un distributeur modestes, et ensuite parce que de part son ton noir et mélancolique, le film détonne pas mal de ce qui se faisait en 1989 en matière d’action. Aussi certains s’attendaient à quelque chose de plus stylisé à la manière du Batman de Tim Burton (et encore une fois les choix de Mark Goldblatt se tournent plus vers des goûts « pulp » et « exploitation » recherchés mais pas sophistiqués à la manière des films hollywoodiens de l’époque), et de plus spectaculaire, mais il s’agissait d’un film à seulement 10 millions de dollars !
Ce film a été réévalué par rapport aux deux versions cinématographiques plus récentes du Punisher (2004 avec Thomas Jane, 2007 avec Ray Stevenson). Comment jugez-vous ces deux films à l’aune du premier volet, mais aussi la version de la série Daredevil, qui va avoir droit à son propre spin off en 2018 ?
Je ne suis pas spécialiste du personnage ou de la BD mais je connais les comics des années 80 et les grandes lignes de ce qui s’est fait après. J’avais vu la version de 2004 que j’avais trouvée tout juste correcte mais assez lisse. Je n’ai pas vu ce qui s’est fait après à part le court réalisé par Phil Jouanou avec encore Thomas Jane, mais d’après ce que des fans m’ont dit, son apparition dans Daredevil est excellente et laisse augurer une très bonne série solo.
Pour finir, si vous deviez encourager les gens qui n’ont pas encore vu le Punisher à lui donner sa chance, que leur diriez-vous ?
Que c’est un film unique un peu OVNI derrière ses apparences de « mauvaise série B » et qu’il faut le prendre dans son contexte. Je trouve certaines critiques négatives assez injustes pour ne pas dire de mauvaise foi. Je ne dis pas que tout le monde devrait adorer Punisher et je conçois que ce ne soit pas le cas mais dans tous les cas, le film a quelque chose d’intéressant et prend des chemins détournés, ce qui lui donne assez de mérite et de sérieux pour ne pas être totalement laminé. Il s’agit d’une « adaptation » avec tout ce que cela implique de positif comme de négatif, mais on ne peut pas comparer Punisher au Captain America d’Albert Pyun et Menahem Golan par exemple. La fin du film, très grave et mélancolique, est d’ailleurs assez unique pour un film de série B de cette époque, pour ne pas dire très belle et remarquable…
Punisher, l’histoire secrète, Jérémie Damoiseau, BOD éditions, 18.99€
Dolph lui même conseille le livre !